samedi 26 janvier 2013

"Le lait de la terre" (Alain Bertrand)

L'écrivain belge Alain Bertrand habite et enseigne à Bastogne. Il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages, dont un essai sur Simenon. Dans "Le lait de la terre", il nous raconte l'histoire de Charles, un professeur, qui quitte Bruxelles pour vivre dans un village d'Ardenne où il espère naïvement trouver le calme et le bon air.

Charles y fait la connaissance d'un monde rural confronté à la crise de l'agriculture, aux normes européennes et au prix du lait peu favorable aux fermiers. Parmi ceux-ci, la belle Irène retient son attention :   "L'amour, Charles n'en connaît pas plus le mode d'emploi que celui de la machine à laver, et si sa belle paysanne lui a laissé des arômes de feuille morte et le toucher de sa chair rousse, il n'a pas osé, il n'a pas pu, il n'a pas eu la force de l'arracher à son christ en marcel, de l'entraîner au-dessus du plancher des vaches, de la basse-cour fienteuse, de l'Ardenne secouée de vent, jusqu'à la couche monumentale des nuages, là où les âmes succombent à toutes les tentations sous l'oeil échauffé du soleil".

"Le lait de la terre" est un roman de terroir bien écrit, avec humour et une pointe d'Orval, qui me fait penser au style d'Armel Job et de René Henoumont. On ressent que l'auteur aime profondément son Ardenne. Voici sa belle description de la Gaume :

"La Gaume est une fille de joie adossée à l'Ardenne boisée. Elle a de jolies feuilles de vigne et tend ses collines vers le sud, en agitant un drapeau bleu, blanc, rouge. Le genou troussé, un talon à plat contre l'écorce, la belle a la cuisse tiédie par un soleil qui cligne de l'oeil tous les jours de l'année. Juste à côté, en Ardenne, il pleut comme vache qui pisse en toute saison, et même la nuit, même l'hiver, même au cours des messes de mariage. Affaire de microclimat, susurre l'office du tourisme de Virton. Autant vérifier sur place s'il y a des mirabelles, des orchidées, et puis des cigales qui déroulent des chansons d'amour provençal... Le prospectus touristique dévoile une jeune femme sans minceurs inutiles, les joues en forme de pommes, la gorge imitant une cuesta - front abrupt et versant en pente douce - la lèvre rincée au cidre. Le verre prêt à être choqué, clin d'oeil vers le spectateur, semble une incitation à la villégiature intime".

1 commentaire :

  1. Voilà un compte rendu bien engageant. Il donne envie de lire ce bel ouvrage. Bien cordialement, Apolline Elter

    RépondreSupprimer